Be outside the box !

Rechercher
Fermer ce champ de recherche.

Une campagne de sensibilisation au décrochage scolaire

Décembre 2022 – Janvier 2023

Quand on dit à un jeune qu’il est important, il le croit et il a raison !

Actuellement, on reconnaît à quel point les choses peuvent être difficiles pour les jeunes. Oui, le décrochage scolaire est en augmentation inquiétante ! De nombreux adolescents manifestent des symptômes dépressifs et de repli, d’autres ne supportent plus toutes ces contraintes qui leur semblent contradictoires. Oui, la situation, après la pandémie et avec les crises qui se succèdent, est souvent difficile à vivre. Mais les jeunes ont ceci d’admirable : ils savent rebondir, résister et nous étonner. Arrêtons donc de les plaindre ou de les critiquer, essayons plutôt de les aider, de les encourager, de les inspirer pour qu’ils deviennent les acteurs et non les victimes de leurs vies. N’est-ce pas le rôle de l’éducation ?

C’est dans cet esprit que Out of the Box a souhaité lancer une campagne de sensibilisation au décrochage scolaire durant cet hiver 2022-2023. En Belgique francophone, ce problème touche près d’un tiers des adolescents et les mesures pour y remédier semblent bien pauvres face à son ampleur. S’ajoute à cela l’absentéisme et la démotivation de nombreux professeurs : on sait que plus de 30 % des cours ne sont pas donnés dans les écoles de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Que font les jeunes quand les profs ne sont pas là ?

Le décrochage scolaire résulte de causes multiples et touche des jeunes de tous les milieux culturels et sociaux. Faut-il pour autant considérer que ces jeunes ont perdu le désir d’apprendre ? Certainement pas ! Mais il est urgent de leur proposer d’autres méthodes d’apprentissage et de les réconcilier avec un cadre scolaire mieux approprié, qui soit bienveillant, accueillant, stimulant et plus créatif.

Depuis plusieurs années, la Fédération Wallonie-Bruxelles a lancé l’ambitieux projet du Pacte pour un enseignement d’excellence. Problèmes et solutions y sont détaillés avec précision et chiffres à l’appui. Mais sur le terrain ? Ces réformes nécessaires sont si lentes à être appliquées et rencontrent si souvent la résistance des professeurs et de leurs représentants syndicaux. Au niveau ministériel, on reconnait une pénurie accrue de professeurs et la dévalorisation de la profession. Que faire pour redonner de l’éclat à ce magnifique métier ? Il semblerait logique d’ajuster sa formation aux attentes actuelles et d’évaluer les compétences des enseignants. Pourtant, on compte déjà cinq grèves depuis septembre 2022 pour contester cette mesure d’évaluation approuvée en théorie. De quoi a-t-on peur ?

La fierté de ceux qui défendent le Pacte pour un enseignement d’excellence repose sur la conviction qu’il faut agir à grande échelle, s’attaquer au « système » et le réformer en profondeur. Cela représente un gigantesque travail dont les résultats promis se font cruellement attendre. Dans un tel contexte, faut-il pour autant négliger, voire mépriser les petites structures pédagogiques qui expérimentent d’autres manières d’enseigner et de motiver les jeunes ? Finalement, ne font-elles pas aussi partie du « système » ? Un gros paquebot mal en point n’a-t-il pas besoin de remorqueurs pour arriver à son port de destination ?

Avec les jeunes de Out of the Box qui sont tous en décrochage scolaire, ces questions sont souvent abordées. Il en résulte des propositions pleines de bon sens et inspirées d’expériences vécues. De plus, elles semblent réalisables à court terme, avant que les résultats du Pacte pour un enseignement d’excellence puissent être observées sur le terrain.

En voici quelques-unes :

Un accès facilité au jury central

La plupart des jeunes qui sont en décrochage scolaire et qui n’ont pas obtenu leur CESS (certificat d’enseignement secondaire supérieur) ne souhaitent pas retourner pas les bancs d’une école. Mais cela ne signifie pas qu’ils n’ont pas l’ambition de poursuivre une formation et d’obtenir ce fameux certificat ! Passer par le jury central s’avère donc une solution alternative opportune et réalisable. Prenons l’exemple des jeunes qui passent à Out of the Box : tous ceux qui, depuis 2025, ont choisi de passer les examens du jury central ont tous réussi et ont entamé des études supérieures. Mais affronter cette épreuve seul est extrêmement difficile : qui peut imaginer qu’un jeune isolé dans sa chambre pendant plusieurs mois et sans stimulation extérieure pourra tenir le coup ? C’est la raison pour laquelle plusieurs écoles de préparation au jury central ont été créées en Belgique. Ces écoles sont privées et leur accès nécessitent des moyens financiers conséquents, ce qui en exclut d’emblée certains jeunes. Pourquoi ne pas créer un fond public/privé de financement pour permettre à ces jeunes d’intégrer de telles écoles ? Un jeune qui, grâce à ce soutien, poursuivra des études après l’obtention du CESS via le jury central, sera certainement plus autonome et épanoui qu’un chômeur sans qualification…

Par ailleurs, il faut admettre que l’organisation du jury central en Fédération Wallonie-Bruxelles est mal organisé, tant au niveau de sa communication, des périodes d’examens que du contenu des programmes. On nous promet des réformes à ce propos, pourvu qu’elles soient rapidement mises en application !

La revalorisation du rôle des éducateurs

Du côté des éducateurs et de leur formation jusqu’ici très incomplète, admettons aussi que très peu de dispositions ont été envisagées dans le Pacte pour un enseignement d’excellence. C’est d’autant plus regrettable que le rôle des éducateurs est essentiel en milieu scolaire : ce sont eux qui permettent de créer des liens de confiance entre les familles, les jeunes et les enseignants, d’encadrer et d’encourager les jeunes qui risquent de décrocher, d’apporter des alternatives créatives d’apprentissage en cas d’absence de professeurs, de repérer des problèmes de maltraitance, de harcèlement et d’addictions, … Améliorer leur formation et diversifier leurs compétences afin qu’ils puissent seconder plus efficacement les enseignants et mieux servir de relai entre eux et les étudiants semblent urgent et prioritaire. Mais comme l’organisation des études secondaires et supérieures sont sous la responsabilité de différents ministres, on nous dira que c’est difficile à mettre en œuvre ! Mais pourquoi ne pas simplifier les choses ? Une telle initiative pourrait servir de référence à d’autres réformes nécessaires mais bloquées par des complexités administratives et politiques…

Une « brigade » mobile pour palier à l’absence des professeurs

Lorsqu’un professeur est absent et qu’il n’a pas de remplaçant, les jeunes sont souvent laissés inactifs, ce qui contribue à leur démotivation scolaire. Certes, il est difficile de réagir en peu de temps et de nombreux directeurs d’écoles s’arrachent les cheveux dans de telles situations. En s’inspirant de ce qui existe au niveau des pompiers (10 900 volontaires pour 17 300 pompiers en Belgique), pourquoi ne pas créer un service réunissant des bénévoles (sportifs, animateurs sociaux et culturels, artistes, enseignants à la retraite, guides culturels…) qui, une fois appelés, pourraient prendre rapidement le relai et remplacer les professeurs absents ?

Une reconnaissance symbolique pour les meilleurs professeurs

Actuellement, on considère que le métier d’enseignant est dévalorisé, que près de 50% des jeunes enseignants le quittent après moins de cinq ans de pratique, qu’il est de plus en plus difficile de recruter de bons professeurs, surtout pour l’apprentissage des langues, des mathématiques et des sciences.

Il est donc urgent que rendre toute sa fierté à ce beau métier ! Dans un tout autre contexte, Napoléon l’avait compris pour ses soldats : en leur décernant la légion d’honneur selon un rituel prestigieux, il encourageait et offrait un hommage officiel aux soldats les plus méritants. Ce rituel existe toujours en France, s’est élargi au fil du temps à la société civile, et chaque année, de nombreuses personnalités se voient décerner cette médaille honorifique. Pourquoi ne pas s’en inspirer pour les meilleurs professeurs ? Non seulement, cela ne nécessiterait qu’un très petit budget, cela susciterait la fierté des personnes ainsi reconnues, mais cela stimulerait certainement tous ceux qui rêvent, même secrètement, d’un tel honneur.

Quelques chiffres qui ne rassurent pas

Même si ces chiffres ne sont pas tous actualisés, ils permettent de mettre en perspective certains des problèmes liés au décrochage scolaire.

En Fédération Wallonie-Bruxelles, on compte 2500 écoles (dont 23% à Bruxelles)  pour 900 000 élèves, tous niveaux confondus. En 2018, 175 000 filles et 182 800 garçons étaient inscrits dans l’enseignement secondaire. L’enseignement secondaire spécialisé enregistrait près de 35 000 élèves, dont 65% de garçons.

On observe que 60% des jeunes âgés de plus de 18 ans sont encore inscrits dans l’enseignement secondaire, ce qui représente un taux de retard important. Par ailleurs, le taux de redoublement dans l’enseignement secondaire de la Fédération Wallonie-Bruxelles est le plus élevé d’Europe.

De l’année scolaire 2012-2013 à celle de 2016-2017, l’absentéisme des professeurs des écoles de la Fédération Wallonie-Bruxelles a augmenté de 20%. On comptabilisait 1070 893 jours d’absence en 2014-2015 pour 102 000 professeurs et 1 191 635 jours d’absence l’année suivante. En 2017-2018, il manquait 5,6% des professeurs chaque jour dans les écoles belges francophones, dont la moitié des absences correspondait à des arrêts de longue durée. Autrement dit, 14% des cours n’ont pas été dispensés durant l’année scolaire 2017-2018, soit une moyenne de 2 heures perdues par semaine pour chaque élève. Par ailleurs, les enseignants francophones peuvent revendiquer chaque année 14 jours de congé de maladie, même s’ils ne sont pas malades… 44% des directeurs d’établissements scolaires ont contesté publiquement et collectivement cette situation (source Medconsult) ; 60 % d’entre eux considèrent que la résistance des enseignants aux changements proposés entrave l’apprentissage des élèves (source OCDE et rapport PISA 2019).

Le taux du décrochage scolaire en Fédération Wallonie-Bruxelles varie selon les sources. Mais il est crédible de considérer qu’il touche plus de 30% des jeunes âgés de 15 à 19 ans, que ce soit temporairement ou définitivement. Face à ce problème, la Fédération Wallonie-Bruxelles a créé le système d’accrochage scolaire (SAS) à travers 13 établissements de petite taille qui accueillent des jeunes durant une période de trois mois, renouvelable une fois : 3 SAS à Bruxelles, 2 dans le Brabant wallon, 2 dans le Hainaut, 4 dans la province de Liège et 2 dans les provinces de Namur et de Luxembourg. Malheureusement, cette offre ne répond que partiellement à la demande.

A partir du mois de mars 2020, de nombreux jeunes ont cessé de fréquenter régulièrement un établissement scolaire, situation justifiée par les mesures sanitaires de confinement, par la désorganisation des structures d’encadrement, l’absentéisme des professeurs et le recours aux cours à distance pour lesquels tous ne sont pas correctement équipés ni motivés. Après cette crise sanitaire, le décrochage a considérablement augmenté et on observe qu’il touche des adolescents de plus en plus jeunes.

Parmi les causes du décrochage scolaire, le harcèlement scolaire et sa variante, le cyberharcèlement, touchent en moyenne un jeune sur trois. Cette violence est déjà observée au niveau des écoles primaires mais c’est en 1ère et 2ème secondaires qu’il est le plus fréquent. Les dommages causés sont énormes et peuvent conduire au suicide.

A Bruxelles, avant la crise du Covid-19, un enfant sur quatre vivait sous le seuil de pauvreté. Plus largement et selon les statistiques officielles établies en 2019 (source Statbel), 10,6% des Bruxelles subissaient des privations matérielles sévères (6,7% en Wallonie) et 37,8% des Bruxellois présentaient un réel risque de pauvreté et d’exclusion (24,6% en Wallonie). Ces chiffres dramatiques sont malheureusement en augmentation depuis la pandémie et la crise actuelle qui impactent des disparités socio-économiques qu’on observe au niveau de l’enseignement et par conséquent du décrochage scolaire.

Depuis de début du confinement imposé au printemps 2020, les appels à l’aide concernant la maltraitance en milieu familial ont triplé. Avant cette période, 40 000 jeunes étaient pris en charge par les services de l’Aide à la Jeunesse de la Fédération Wallonie-Bruxelles et 17 signalements de maltraitance envers des mineurs étaient enregistrés par jour (source Ligue des Droits de l’Enfant). Une enquête menée par la psychologue Fabienne Glowacz de l’Université de Liège, publiée en novembre 2020, constate que 80% des jeunes interrogés, âgés de 12 à 18 ans, souffrent d’angoisses accrues depuis le début de la crise. Parmi eux, 9% avouent des gestes suicidaires et/ou d’automutilation.

En Wallonie et à Bruxelles, de 2002 à 2016, les demandes de revenu d’intégration sociale (CPAS) de la part d’étudiants de plus de 18 ans a été multiplié par 7,4. En 2015, 18 498 étudiants de l’enseignement supérieur ont bénéficié d’une aide sociale en Fédération Wallonie-Bruxelles, ce qui correspond à une augmentation de 15% par rapport à l’année précédente, pour une population estudiantine qui n’avait augmenté que de 3,5% (source Covedas). Depuis la crise sanitaire, la situation s’est encore aggravée mais les chiffres précis de cette période ne nous sont pas encore parvenus.

A Bruxelles, un jeune sur cinq âgé de 15 à 24 ans consomme du cannabis. La consommation de drogues illicites est deux fois plus importante à Bruxelles qu’en Flandre et en Wallonie. Ce pourcentage a triplé depuis 2013 et une affaire judiciaire sur dix liée à la drogue concerne un jeune de moins de 18 ans. (enquête de Santé 2018, Lydia Gisle, Usage des drogues, Ed. Sciensano, octobre 2019).

Parmi les jeunes souffrant d’addictions non liées à la drogue et traités au CHU Brugmann, un jeune sur trois âgé de 15 à 25 ans présente une réelle addiction aux jeux vidéo, une échappatoire liée généralement à d’autres difficultés. (source CHU Brugmann en 2018).

Le Pacte d’excellence, une réponse à la crise de l’enseignement ?

  • Une nouvelle gouvernance avec élaboration, contractualisation et mise en œuvre d’un plan de pilotage propre à chaque école

800 écoles concernant un tiers des élèves en Fédération Wallonie-Bruxelles finalisent leurs plans de pilotage. Ainsi, plus de 30 000 acteurs – directions, enseignants et autres membres du personnel scolaire – se mobilisent pour élaborer le plan de pilotage de leurs écoles ; près de 150 000 acteurs – enseignants, directions, parents, élèves – répondent aux questionnaires permettant d’identifier un état des lieux de chaque école.  Ce dispositif s’avère être un bon outil de mobilisation et de cocréation des acteurs de terrain. Ces plans de pilotage font ensuite l’objet d’une révision et d’une contractualisation avec le pouvoir régulateur qui engage chaque école pour au moins 6 ans. L’objectif consiste à ce qu’en mars 2021, chacune des 2500 écoles de la Fédération Wallonie-Bruxelles ait élaboré son plan de pilotage.

  • Le déploiement systématique des pratiques collaboratives au sein des écoles

Début 2019, un nouveau décret clarifie la charge de travail des enseignants et notamment l’officialisation de deux heures de travail en équipe par semaine pour l’ensemble du personnel de chaque école. Ces engagements devraient permettre de généraliser le travail collaboratif au sein des équipes, lequel n’est jusqu’à présent pas organisé de manière systématique. En plus des expériences pilotes menées dans différents réseaux depuis 2014, un programme ambitieux est initié en 2019 au sein du réseau communal, notamment en lien avec la mise en œuvre des plans de pilotage.

Ces programmes de terrain aident à surmonter les craintes et résistances au changement pour emporter l’adhésion des acteurs de terrain qui y participent. Compte tenu des changements qui y sont associés, leur déploiement nécessitera encore plusieurs années. Ils requièrent de la continuité dans les formations, le déploiement des outils, un accompagnement de qualité, la communication avec tous les acteurs.

En mai 2019, l’association fixe les priorités de l’année 2019-2020. Il s’agit d’évaluer l’impact potentiel des missions considérées, l’adhésion des acteurs à un support externe, la capacité et la compétence de l’association à modifier le système dans son ensemble. Les thématiques suivantes sont confirmées : la mise en œuvre des plans de pilotage, le soutien à apporter aux réseaux scolaires de Wallonie et de Bruxelles, le soutien aux écoles en écart de performance, la réorganisation de l’enseignement qualifiant.

En septembre 2022, le Pacte d’excellence est enfin mis en œuvre au niveau de l’enseignement primaire. Plusieurs axes y sont privilégiés : rythme scolaire modifié, tronc commun pour tous les enfants, nouveaux référentiels, écoles plus inclusives, professeurs travaillants plus collectivement, parcours qualifiant… Si un budget de 300 millions d’Euros y sera consacré dès 2023, comment garantir qu’il pourra être assumé par une Fédération Wallonie-Bruxelles déjà en déficit inquiétant ?

Le Pacte d’excellence: ambitieux et fragile

Béatrice Delvaux, Editorialiste en chef, Le Soir. Publié le 11/06/2022

Huit ans après son lancement, la fameuse réforme systémique de l’école va entrer dans sa phase la plus cruciale, particulièrement d’abord pour les première et deuxième primaires.

Dans un pays dont on dit si souvent qu’il n’a plus la capacité ou la volonté de mener de grands projets, l’entrée en vigueur du Pacte d’excellence lors de la rentrée scolaire du 29 août prochain est tout simplement à saluer.

Tout dans ce parcours était ambitieux et casse-gueule. Mais même les petits jeux politiques n’ont pas cherché à couler ce qui avait des allures de paquebot. Mieux, les ministres successives ont fait en sorte que ce Pacte d’excellence lancé par Joëlle Milquet arrive à bon port. Que Marie-Martine Schyns soit loyale à l’initiatrice, CDH comme elle, était logique, mais la socialiste Caroline Désir va procéder avec les mêmes convictions à sa mise en application. Les libéraux ont soutenu le processus, dans l’opposition et au pouvoir.

Il y aurait intérêt à saisir ce qui a soudé les forces politiques francophones pour tenter de rééditer une sorte d’exploit.

Est-ce l’importance cruciale de l’enjeu ? La responsabilité lourde de politiques pour l’avenir de l’enseignement francophone busé par les enquêtes Pisa ?

Le résultat en tout cas est là. Huit ans après son lancement, la fameuse réforme systémique de l’école va entrer dans sa phase la plus cruciale, particulièrement d’abord pour les première et deuxième primaires. L’avancement de la rentrée scolaire au 29 août est d’ailleurs le résultat du changement des rythmes scolaires souhaité par ce plan.

Le tronc commun pour tous les élèves jusqu’à la troisième secondaire et l’introduction de nouveaux référentiels de cours sont d’autres objectifs clés, comme la mise en place d’un co-enseignement, avec parfois deux professeurs par classe en primaire, pour réduire l’échec scolaire et les inégalités.

On le voit : ce Pacte qui a fait l’objet d’une longue concertation et d’un descriptif très précis n’est pas cosmétique. C’est une révolution plus complète encore que le passage au rénové à la fin des années 70 – au siècle dernier !

Le seul écueil, de taille, est celui des moyens : il a d’ailleurs pris au cours des derniers mois l’allure d’un potentiel iceberg. Même si des centaines de millions sont investis dans le personnel, cette réforme repose sur un socle fragilisé par une double crise. Primo, la très grande fatigue des directions noyées sous l’administratif et l’accompagnement de familles en crise profonde, l’appel à l’aide des PMS submergés par la détresse des élèves et la colère des professeurs descendus déjà trois fois dans la rue. Secundo, la pénurie d’enseignants que personne n’arrive à objectiver numériquement. Un comble dans le cadre d’une réforme qui fait du pilotage des écoles et du monitoring de la force de travail, un élément clé de son succès… Il va falloir trouver des solutions car il est impensable qu’un tel processus, lancé en 2014, échoue : le système scolaire pourrait sombrer sous le poids de l’échec.

Bien entendu, tout cela suppose une certaine souplesse et beaucoup de temps dans les négociations en cours avec les institutions et responsables politiques communautaires, communaux et régionaux. Si la poursuite des projets formulés semble acquise, il est à craindre que leur mise en œuvre concrète soit freinée par la résistance de nombreux acteurs (directeurs d’écoles, professeurs, syndicats, partis politiques…) et par des contraintes budgétaires. Pensons notamment à la réforme de la formation des futurs enseignants approuvée en janvier 2019 par le parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Cela fait plus de dix ans que ce projet est sur la table des nombreux ministres qui s’y sont impliqués ; cela fait quatre ans que les désaccords politiques en freinent sa mise en œuvre. En septembre 2020, les doyens de 31 facultés universitaires francophones ont lancé un cri d’alarme à ce propos : face à la situation déplorable des finances des universités et hautes écoles, ils ont dénoncé le flou budgétaire qui entoure la réforme et son manque de vision pérenne. En tenant compte des moyens déficitaires dont dispose la Fédération Wallonie-Bruxelles, encore réduits depuis les crises de ces dernières années, il est à craindre que cette réforme urgente soit encore reportée.

Ci-dessous :

Out of the Box remercie la société Decaux pour son soutien à la campagne qui couvrira près de 300 panneaux publicitaires digitaux à Bruxelles entre le 27 décembre 2022 et le 3 janvier 2023.